ARCHIVÉE - Ail et oignon : Insuffisance des preuves pour les ajouter à la liste des allergènes alimentaires prioritaires au Canada - Un examen systématique

Sommaire :

Les scientifiques de Santé Canada ont mené un examen systématique de la documentation scientifique disponible sur l'allergénicité de l'ail et de l'oignon afin de déterminer si les observations scientifiques sont suffisantes pour justifier l'ajout de l'ail et (ou) de l'oignon à la liste des allergènes alimentaires prioritaires tels que définis au Canada. L’information que l’on a retenue comme étant pertinente pour l’évaluation a été sélectionnée en ayant recours aux critères canadiens qui ont été établis pour la justification des modifications à la liste des allergènes alimentaires prioritaires au Canada.

En tout, 36 publications scientifiques ont été considérées comme étant pertinentes pour déterminer si l'ail et (ou) l'oignon font partie des allergènes alimentaires. Toutefois, l'évaluation des données disponibles actuellement ne procure pas de preuves suffisantes pour satisfaire aux critères canadiens et ajouter ces aliments à titre de nouveaux allergènes à la liste des allergènes alimentaires prioritaires. Bien que des observations scientifiques permettent de présumer que certaines personnes subissent des réactions graves à la suite de l'ingestion d'ail et (ou) d'oignon, la prévalence des allergies à l'ail et (ou) à l'oignon chez les enfants et chez les adultes demeure inconnue, et les données cliniques sont insuffisantes pour établir une relation de cause à effet crédible pour l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon par la voie orale. Qui plus est, selon l'information actuellement disponible dans la base de données, la possibilité qu'une personne subisse des réactions allergiques graves provoquées par des sources cachées d'ail et (ou) d'oignon dans les aliments préemballés est considérée comme étant minime.

Ainsi, actuellement, il est recommandé que l'ail et l'oignon ne soient pas ajoutés à la liste des allergènes alimentaires prioritaires au Canada et que les modifications proposées au Règlement sur les aliments et drogues (1220 - Étiquetage amélioré des sources d'allergènes alimentaires et de gluten et des sulfites ajoutés) ne soient pas applicables à l'utilisation de l'ail et (ou) de l'oignon dans les denrées alimentaires.

Situation :

Le 26 juillet 2008, Santé Canada a publié ses propositions de modification du Règlement sur les aliments et drogues(1220 - Étiquetage amélioré des sources d'allergènes alimentaires et de gluten et des sulfites ajoutés) dans la partie I de la Gazette du Canada (GCI). Un peu plus de 140 commentaires ont été recus du public, de groupes de patients, de professionnels de la santé, d'un organisme de consommateurs et d'organismes gouvernementaux pendant la période de consultation publique au sujet des modifications proposées.

Dix pour cent des répondants ont demandé que l'ail et (ou) l'oignon soient ajoutés à la liste des allergènes alimentaires prioritaires à la suite des modifications réglementaires, et ce, sur la base d'observations ou d'expériences personnelles d'effets nocifs associés à la consommation d'ail et (ou) d'oignon.

En réponse à la rétroaction reçue pendant la consultation publique, Santé Canada a entrepris un examen systématique de la documentation disponible afin de déterminer la validité scientifique de l'ajout de l'ail et (ou) de l'oignon à la liste des allergènes alimentaires prioritaires au Canada. Conformément aux modifications proposées au Règlement sur les aliments et drogues, les sources des aliments énumérés à la liste présentée dans la définition de l'expression allergène alimentaire devraient être déclarées sur l'étiquette des produits alimentaires préemballés.

Objectif :

Afin de déterminer la validité scientifique de l'ajout de l'ail et (ou) de l'oignon à la liste des allergènes alimentaires prioritaires au Canada, l'information obtenue au moyen d'un examen systématique de la documentation scientifique disponible au sujet de l'allergénicité potentielle de l'ail et (ou) de l'oignon doit satisfaire aux critères canadiens pour justifier la modification de la liste des allergènes alimentaires prioritaires.

Méthodes :

Les méthodes pour la gestion et l'évaluation de l'information scientifique disponible ont été mises au point pour faire en sorte que l'on adopte une démarche uniforme et transparente à l'égard de l'évaluation de l'allergénicité potentielle d'un aliment ou d'un ingrédient alimentaire.

Collecte systématique de données

Une recherche de publications en anglais, français et espagnol a été menée dans les bases électroniques suivantes : Ovid Medline® In-Process & Other Non-Indexed Citations; Ovid Medline®, de 1950 à ce jour; Ovid Medline® In-Process & Other Non-Indexed Citations, 18 novembre 2008; Ovid Embase, de 1980 à 2008, semaine 45 et FSTA Direct, dont la dernière mise à jour a eu lieu le 10 novembre 2008. Les détails sur les critères de recherche sont présentés à l'Annexe 1.

Organisation et mise en ordre des données

Les études rencontrant les critères de sélection (voir la section « méthode ») ont été revues et évaluées sur la base de la qualité des preuves. Les publications inclassables au moyen de ces critères ont été citées en référence dans les résultats sous la rubrique (A) Caractérisation de l'ail et de l'oignon. Les observations scientifiques issues des publications qui ont satisfait aux paramètres de la qualité des preuves ont été tabulées selon les catégories suivantes :

(B) Études cliniques (tableau 1) - observations issues d'études quasi expérimentales;

(C) Autres études pertinentes (tableau 2) - observations issues d'études descriptives non expérimentales (comparatives/corrélation);

(D) Rapports de cas (tableau 3) - observations issues d'études descriptives non expérimentales.

Résultats :

En tout, 411 publications ont été repérées avec les moyens de recherche dans les bases de données en utilisant les critères présentés à l'Annexe 1. Cependant, en se basant sur les critères d'inclusion et d'exclusion, seulement 65 publications ont été sélectionnées et considérées pertinentes pour rencontrer les objectifs du présent examen. Parmi ces 65 publications, 20 ont été groupées selon la qualité des preuves, dans les tableaux 1 à 3, en appui aux recommandations réglementaires. Les 45 publications restantes n'ont pas été intégrées à l'analyse des risques; cependant, 16 publications qui fournissaient de l'information sur la caractérisation de l'ail et de l'oignon ont été retenues pour leur pertinence dans le cadre de l'évaluation. En tout, 36 publications de documentation scientifique ont été considérées comme étant pertinentes pour déterminer si l'ail et (ou) l'oignon sont des allergènes alimentaires prioritaires.

A. Caractérisation de l'ail et de l'oignon

L'ail et l'oignon sont des plantes herbacées vivaces à fleurs qui appartiennent à la famille des Alliaceæ (auparavant classifiées dans la famille liliacées [Liliaceæ]). Dans la famille des Alliaceæ, le genre Allium regroupe des légumes à bulbes ou à cormus (Fay et Chase, 1996). Un bulbe est un renflement souterrain constitué d'écailles charnues et épaisses, et un cormus est une tige souterraine courte, solide et verticale protégée par de fines écailles papyracées (McGovern et La Warre, 2001). L'ail (Allium sativum L.), l'oignon (Allium cepa), l'échalote (Allium oschaninii), le poireau (Allium porrum) et la ciboulette (Allium schœnoprasum) sont classés dans ce genre (Fay et Chase, 1996).

Tant l'ail que l'oignon sont utilisés à des fins alimentaires et médicinales depuis des milliers d'années (Zohary et Hopf, 2000). Tous deux sont riches en composés volatils contenant du soufre, lesquels sont à la source de leur saveur et de leur odeur piquantes, de même que de leurs nombreux effets bénéfiques pour la santé. À cause de la saveur piquante de ces végétaux, on les utilise habituellement comme assaisonnements ou comme condiments dans les préparations culinaires. En plus d'utiliser l'ail et l'oignon frais dans la cuisine, plusieurs préparations commerciales tant d'ail que d'oignon sont offertes sur le marché, y compris, mais sans s'y limiter : l'ail et l'oignon marinés, déshydratés, en poudre, macérés dans l'huile ou sous forme d'essence.

L'ail compte au nombre des plantes médicinales les plus étudiées. De 1960 à 2007, plus de 3 000 rapports de recherche ont été publiés sur les effets chimiques et biologiques de l'ail et des préparations à base d'ail. Ces études portent principalement sur les effets antimicrobiens et anticancéreux de l'ail ainsi que sur ses effets cardiovasculaires (Signh et Signh, 2008). Des allégations semblables d'effets bénéfiques pour la santé ont été formulées à l'égard de l'oignon. Cependant, on trouve moins d'information biochimique détaillée à ce sujet dans la documentation scientifique.

La quantité de constituants chimiques présents dans l'ail varie substantiellement selon l'endroit et la façon dont on le cultive, de même que selon le mode de préparation et d'entreposage du produit fini (Morbidoni et al., 2001). Les gousses d'ail intactes ne contiennent que quelques composés actifs, le principal constituant chimique étant l'acide aminé alliine, un dérivé alkylé de sulfoxyde d'allylcystéine. La teneur en alliine peut varier de 0,2 à 2 % du poids frais de l'ail. En les écrasant, en les mastiquant ou en les coupant (ou en exposant l'ail déshydraté et pulvérisé à l'eau), les gousses d'ail libèrent l'enzyme allinase qui lyse rapidement le sulfoxyde d'allylcystéine cytosolique pour former de l'acide sulfénique, lequel se condense immédiatement pour former le thiosulfinate de diallyle (allicine). À la température ambiante, la formation d'allicine survient en 0,2 à 0,5 minute. L'allicine, le moins stable des thiosulfinates formés, constitue de 70 à 80 % des thiosulfinates totaux. Les thiosulfinates libérés de l'ail écrasé sont des molécules réactives qui subissent de nombreuses transformations provoquées par des conditions telles que la température, le pH du milieu et les solvants. Les principaux produits de transformation à la suite de l'incubation des thiosulfinates dans l'eau sont les trisulfure de diallyle, disulfure de diallyle et trisulfure de méthyle et d'allyle (Singh et Singh, 2008).

Comme c'est le cas pour l'ail, dans l'oignon, l'enzyme allinase est libérée lorsque ses cellules sont atteintes par une manipulation, soit lorsqu'on l'écrase, le mastique ou le coupe. L'enzyme dégrade rapidement les sulfoxides ce qui produit des acides sulféniques et par la suite, l'allicine. Tel que l'on en a fait état à l'égard de l'ail, l'allicine, selon les conditions auxquelles elle est exposée, peut générer de nombreux produits de transformation et les acides sulféniques instables peuvent de nouveau se réorganiser en un gaz volatil appelé syn-s-oxyde de thiopropanal, lequel irrite les yeux (Thomas, 1999).

La majorité des études disponibles ont porté sur la caractérisation de l'agent irritant et sur les propriétés de sensibilisation au contact plutôt que sur l'allergénicité systémique de l'ail et de l'oignon. Des protéines de poids moléculaire faible, lesquelles sont habituellement responsables des réactions allergiques de dermatite de contact, ont été détectées dans des extraits d'ail au moyen de tests épicutanés et d'expériences de sensibilisation chez des cobayes. Ces protéines sont les suivantes : le disulfure de diallyle, le disulfure d'allypropyle et l'allicine (Bleumink et al., 1972; Papageorgiou et al., 1983). Cependant, dans le cadre de ces études, on n'a pu exclure la possibilité que l'allicine provoque une réaction d'irritation. Les agents déclenchants de réactions allergiques systémiques sont habituellement des protéines d'un poids moléculaire supérieur (Bleumink et al., 1972). Le poids moléculaire de la plupart des allergènes alimentaires connus se situe entre 10 kDa et 70 kDa (Taylor et Lehrer, 1996).

Des analyses par immunotransfert menées sur du sérum d'individus, dont on a fait état dans des rapports de cas, ont permis de détecter des bandes protéiques se liant à l'IgE d'une masse moléculaire d'environ 12 kDa et de 40 à 50 kDa, et ce, tant pour l'ail que pour l'oignon. En utilisant le sérum d'une femme ayant eu un accident anaphylactique survenu pendant un effort après la consommation d'ail non mûr, une bande de 12 kDa a été décelée par immunotransfert pour les extraits d'ail non mûr, d'ail, d'oignon, de poireau, de noisettes et de pollen d'armoise commune (Perez-Pimiento et al., 1999). Enrique et al. (2007) ont aussi fait état d'une bande unique de 12 kDa en utilisant de l'extrait d'oignon et le sérum d'une femme atteinte d'urticaire après avoir consommé de l'oignon cru. Asero et al. (1998) ont découvert des bandes de masse moléculaire de 10, de 20 et de 40 kDa en utilisant de l'extrait d'ail et le sérum d'une femme atteinte d'urticaire après ingestion d'ail cuit et cru ainsi qu'après un contact avec ceux-ci. Avec l'oignon, ils ont aussi observé une IgE-réactivité, soit des bandes de 15 et 43 kDa, en utilisant le sérum d'un homme atteint d'urticaire/œdème de Quincke après avoir consommé de l'oignon cru (Asero et al., 2001) . La documentation scientifique ne présente pas de caractérisation plus détaillée de ces protéines (Borrelli et al., 2007; McGovern et LaWarre, 2001).

Au contraire, Kao et al., (2004), à partir du sérum de 15 sujets atteints d'allergie à l'ail, ont étudié l'antigénicité, l'allergénicité et la réactivité croisée d'une protéine de 56 kDa se liant à l'IgE. On a établi que la protéine isolée était l'alliine lyase. Les tests cutanés ont confirmé que l'alliine lyase a déclenché une réaction d'hypersensibilité dans laquelle interviennent des IgE chez des sujets allergiques à l'ail. Les analyses de l'IgE-réactivité croisée et de l'inhibition de l'IgE ont démontré que l'alliine lyase de l'ail a manifesté une forte réactivité croisée avec l'alliine lyase d'autres espèces d'Allium telles que le poireau, l'échalote et l'oignon. Qui plus est, on a découvert que les épitopes glucidiques contribuent à la liaison de l'IgG et de l'IgE à l'alliine lyase (Kao et al., 2004). L'analyse de l'homologie entre l'alliine lyase de l'ail et de l'oignon réalisée par Nock et Mazelis (1989) a révélé que les enzymes n'ont que très peu d'homologie sur le plan de la structure; des sous-unités et des fractions de glucide de taille semblable sont passablement différentes dans chaque cas. Ces résultats peuvent expliquer pourquoi les rapports de réactivité croisée entre les différents légumes Alliacea varient grandement dans la documentation. On évoque aussi, dans la documentation, le fait que la variation de la réactivité croisée d'un rapport à l'autre peut être due à la variation de la réactivité croisée entre les individus (Sanchez-Hernandez et al., 2000; Pries et al., 2002). Toutefois, l'effet des fractions de glucide dans l'ail et l'oignon sur l'allergénicité et la réactivité croisée exige une étude plus approfondie, car les épitopes glucidiques peuvent se lier aux IgE humaines chez les sujets allergiques et ceux-ci jouent un rôle dans la réactivité croisée entre les allergènes de sources non apparentées (Hiemori et al., 2000; Iacouacci et al., 2001).

Dans le cadre des études où des protéines IgE-réactives ont été détectées dans l'ail et (ou) dans l'oignon, les protéines n'ont été soumises à aucun essai de thermostabilité ni à aucun essai enzymatique. Cependant, des observations issues d'études de cas indiquent que les protéines allergéniques sont vulnérables aux enzymes digestives et à la chaleur. Deux sujets dont les résultats se sont révélés positifs au test cutané par piqûre et ayant des IgE sériques pour l'oignon n'ont pas éprouvé de réactions allergiques après avoir consommé de la poudre d'oignon (Valdivieso et al., 1994), et dans plusieurs cas, on a fait état d'antécédents de réactions allergiques après avoir consommé de l'ail et de l'oignon crus, mais d'une tolérance à l'ail et à l'oignon cuits.

B. Études cliniques (tableau 1)

Aucune étude charnière qui présentait des observations issues de méta-analyses d'essais cliniques aléatoires, d'essais cliniques aléatoires individuels ou d'essais cliniques non aléatoires n'était disponible au sujet de l'évaluation de l'allergénicité de l'ail et de l'oignon. Cependant, six études qui ont été menées en ayant recours à une évaluation ouverte de l'allergénicité, entre autres, à l'ail (deux études), à l'oignon (une étude) et tant à l'ail qu'à l'oignon (trois études) ont été repérées dans la documentation. Pour réaliser ces évaluations, on a eu recours aux provocations orales et labiales et (ou) à une combinaison de test par piqûre, de technique RAST et de détermination des IgE sériques spécifiques de l'ail et (ou) de l'oignon afin de vérifier s'il y avait une réaction allergique et de quantifier la prévalence des réactions à certaines denrées alimentaires. Ces études sont présentées au tableau 1.

Rancé et Dutau (1997) se sont penchés sur plus de 25 allergènes alimentaires chez 142 enfants ayant des antécédents d'allergies alimentaires. Les sujets ont été soumis à la provocation labiale pour diverses denrées alimentaires, et lorsque les résultats de celle-ci se sont révélés négatifs, une provocation en simple insu comparative avec placebo a été menée. Une réaction labiale positive à l'ail a été observée chez un sujet (1 %). Dans cette étude, les œufs (75 %), les arachides (60 %) et la moutarde (15 %) se sont révélés les allergènes les plus courants. En 2002, Rancé et Dutau ont aussi fait état d'une prévalence de 1 % de l'allergie à l'ail parmi 163 enfants déjà atteints d'asthme validé par des épreuves de fonctions respiratoires (Rancé et Dutau, 2002).

Valdivieso et al. (1994) ont effectué des tests cutanés par piqûre pour l'allergie à l'oignon sur 106 patients d'une clinique d'allergologie choisis au hasard. Des 106 sujets, 8 (8 %) ont obtenu des résultats positifs au test par piqûre pour l'oignon et 4 de ces 8 sujets ont éprouvé des symptômes cliniques tels que la rhinoconjonctivite, la dyspnée, l'eczéma et l'asthme. Ces quatre sujets ont participé à des essais de provocation par voie respiratoire nasale et (ou) orale. Chez tous les sujets, on a observé des réactions positives à l'extrait d'ail chaud et à température ambiante. Deux sujets ont subi une rhinoconjonctivite intense et un sujet a éprouvé une oppression thoracique ainsi que des sifflements et de la dyspnée après l'exposition à l'odeur de l'oignon. Seulement deux sujets ont participé à une provocation orale en double insu avec 2 g de poudre d'oignon. Cependant, aucun n'a manifesté de réactions allergiques. De l'avis de l'auteur, ces résultats permettent de présumer que l'oignon constitue un allergène respiratoire.

Un essai ouvert ayant pour objet l'examen de la fréquence des symptômes provoqués par des aliments, soit des allergies et des intolérances alimentaires, chez 169 sujets monosensibilisés au pollen de plante herbacée a permis d'observer que le nombre de sujets atteints d'intolérance alimentaire était plus élevé que celui des sujets atteints d'allergies alimentaires (Boccafogli et al., 1994). L'allergie alimentaire avérée est définie par l'observation d'une production d'IgE en réaction à l'aliment et du syndrome d'allergie orale, de symptômes gastrointestinaux, d'urticaire et d'oedème de Quincke deux heures après l'ingestion d'une petite quantité d'un aliment. Parmi 169 sujets, 19 (11 %) ont été considérés comme étant atteints d'allergies alimentaires et 46 (27 %), d'intolérances alimentaires. Des résultats positifs de détection des IgE spécifiques pour l'ail et l'oignon ont été obtenus chez 58 % (7/12) et 33 % (3/9) des sujets respectivement. La provocation orale a permis de confirmer qu'un sujet était allergique à l'ail et un autre, à l'oignon (1/169; 0,6 %). Une intolérance à l'ail s'est manifestée chez six sujets (4 %) et une intolérance à l'oignon chez quatre sujets (2 %). Les sujets qui ont été soumis à une provocation à l'ail et (ou) à l'oignon ont pour la plupart subi de l'urticaire et des symptômes gastrointestinaux. Aucun symptôme respiratoire n'a été observé chez les sujets (Boccafogli et al., 1994). On a considéré que ces réactions étaient d'une gravité légère à modérée (Brown, 2004).

Une étude rétrospective a été menée en ayant recours à 26 allergènes alimentaires et à 14 sujets qui avaient des antécédents d'anaphylaxie causée par l'exercice après la consommation d'un allergène (Romano et al., 1995 et 1998). Des 14 sujets, 10 (71 %) ont obtenu des résultats positifs à l'oignon et 9 (64 %) à l'ail au moyen de test par piqûre et (ou) de la technique RAST. Un sujet a participé à une provocation aliment-exercice après avoir consommé de l'ail. Cependant, aucune réaction n'a été observée. L'oignon n'a pas été intégré à la provocation aliment-exercice. Les auteurs ont soulevé le fait que les informations sur les antécédents cliniques des sujets n'ont pas été aussi utiles pour l'interprétation que les résultats positifs aux tests par piqûre et à la technique RAST pour l'ail, l'oignon, le persil et le basilic, car généralement, les sujets ne se souvenaient pas si le repas à l'origine de l'anaphylaxie provoquée par l'exercice contenait ces ingrédients.

Asero et al. (2007) ont mené une étude ouverte sur l'allergie en évaluant des légumes, dont l'ail et l'oignon, afin de déterminer les légumes sans danger pour les personnes atteintes d'une allergie aux protéines de transfert de lipide. En Europe méridionale, les protéines de transfert de lipide constituent le principal allergène alimentaire (Enrique et al, 2007). Quarante-neuf sujets qui ont été monosensibilisés aux protéines de transfert de lipides ont été sélectionnés, de même que des groupes témoins de sujets sensibilisés au pollen (24 sujets), à la profiline (18 sujets) ainsi qu'à la fois aux protéines de transfert de lipide et au pollen (16 sujets). Aucun sujet n'a réagi après la consommation d'ail, et deux ont réagi après la consommation d'oignon. Les résultats positifs au test par piqûre pour l'ail et l'oignon ne se sont pas révélés statistiquement significatifs en comparant le groupe des sujets monosensibilisés aux protéines de transfert de lipide et les groupes témoins. Sur 36 sujets monosensibilisés aux protéines de transfert de lipides, 22 % (8/36) ont obtenu des résultats positifs au test par piqûre pour l'ail alors que ce fut le cas pour 31 % (4/13) des témoins. Pour l'oignon, les résultats positifs étaient répartis comme suit : 39 % (16/41) des sujets monosensibilisés aux protéines de transfert de lipides et 43 % (6/14) des témoins. Les auteurs ont considéré que la précision du test par piqûre s'est révélée faible. Ils ont fait état du grand nombre de sujets ayant obtenu des résultats positifs au test par piqûre pour des aliments qu'ils ont déjà consommés sans pour autant éprouver de symptômes, y compris l'ail et l'oignon.

C. Autres études pertinentes (tableau 2)

Lors de la recherche dans la documentation, on a repéré trois études descriptives non expérimentales pertinentes à l'évaluation de l'allergénicité de l'oignon (une étude) et à la fois de l'ail et de l'oignon (deux études). Ces études sont présentées au tableau 2.

Avila-Castanon et al. (2002) ont effectué une analyse rétrospective de 1 419 sujets atteints d'allergies alimentaires pour déterminer la fréquence de l'hypersensibilité à des aliments particuliers. Des résultats positifs au test par piqûre pour l'oignon ont été obtenus chez 4 % (56 sujets) du groupe à l'étude. L'ail a été exclu de cette étude.

Dans le cadre d'une analyse rétrospective de neuf ans réalisée en France (1994), André et al., ont tenté de déterminer quels sont les aliments les plus fréquemment associés à une réaction anaphylactique. Ni l'ail ni l'oignon ne comptaient au nombre des 19 aliments les plus fréquemment associés aux réactions anaphylactiques chez 580 sujets. Les auteurs ont remarqué une tendance croissante de la fréquence de la sensibilisation à l'ail et à l'oignon au fil du temps. Cependant, on a considéré qu'une consommation accrue et des examens cliniques plus attentifs étaient à la source de cette tendance.

Moneret-Vautrin et al. (2002) ont mené une analyse rétrospective d'une base de données sur les allergies alimentaires, laquelle contenait les résultats aux tests par piqûre de 589 sujets et 4 rapports de cas pertinents pour l'ail ou l'oignon. Pour l'ail, les résultats aux tests par piqûre se sont révélés positifs chez 20 sujets (10 adultes et 10 enfants) (8 %) parmi 265 tests, et pour l'oignon, chez 7 sujets (5 adultes et 2 enfants) (3 %) parmi 263 tests. Dans les rapports de cas, on a fait état de trois allergies à l'ail et d'une allergie à l'oignon. Les personnes allergiques à l'ail ont été soumises, soit à un test de provocation en simple aveugle ou en double aveugle comparatif avec placebo, soit à un test de provocation labiale. Les résultats pour ces trois personnes se sont révélés positifs. Dans l'un des cas, on a observé de l'urticaire après l'ingestion de 1 000 mg d'ail. On a considéré que cette réaction était d'une gravité légère (Brown, 2004). Dans un autre cas, l'ingestion de 500 mg d'ail a provoqué du prurit laryngé, de la rhinorrhée et de la toux. On a considéré que ces réactions étaient d'une gravité modérée (Brown, 2004). Le dernier cas faisait état de résultats positifs à la provocation labiale, mais sans plus de détails. Une personne allergique à l'oignon n'a pas recu de test de provocation, car elle avait des antécédents de mastocytose et d'anaphylaxie systémique après la consommation de céleri, de carotte, de noisette et d'oignon.

D. Rapports de cas (tableau 3)

Douze rapports de cas de réactions allergiques à l'ail (6 cas), à l'oignon (5 cas) et à la fois à l'ail et à l'oignon (un cas) ont été repérés dans la documentation. Ces rapports de cas sont présentés par ordre chronologique par date de publication au tableau 3, et on y décrit la gravité des réactions à l'ail et à l'oignon, de même qu'on y détermine les sources d'exposition à l'ail ou à l'oignon.

Puisque seuls trois rapports de cas faisaient état de provocations orales et qu'un seul faisait état de la dose déclenchante, les renseignements fournis par la plupart des cas étaient limités. Néanmoins, les rapports de cas ont fourni de précieux renseignements sur la gravité des réactions et sur les conditions dans lesquelles celles-ci ont été déclenchées. Les réactions variaient de l'anaphylaxie aiguë à des symptômes cutanés généralisés. Parmi les 12 rapports de cas, 7 (3 à l'ail, 3 à l'oignon et un aux deux) personnes ont fait état de réactions de type anaphylactique et 4 (une à l'ail, 2 à l'oignon et une aux deux) ont eu besoin d'une intervention médicale d'urgence. Les rapports de cas ont démontré que les protéines allergéniques de l'ail et de l'oignon sont vulnérables à la digestion enzymatique et (ou) à la chaleur. Dans plusieurs cas, on a fait état d'antécédents de réactions allergiques après la consommation d'ail et d'oignon crus, mais d'une tolérance à l'ail et à l'oignon cuits. On a obtenu des résultats négatifs à la suite d'une provocation orale avec de l'ail cuit (Pries et al., 2002). Dans quatre des cinq cas, on a fait état d'allergie à l'oignon cru. Cependant, une provocation orale après l'exercice, et ce, après la consommation d'oignon cuit a produit des résultats positifs, mais ceux-ci se sont révélés négatifs sans exercice. Cette réaction à l'oignon cuit a été déclenchée après en avoir consommé 30 g et avoir couru pendant 10 minutes (Perez-Calderon et al., 2002).

Analyse :

Une évaluation globale de la documentation disponible permet de présumer que la base de données pour évaluer l'allergénicité alimentaire potentielle de l'ail et (ou) de l'oignon est limitée sur le plan scientifique. Les limites de l'examen systématique de la documentation telles que décrites ci-dessous ont été prises en considération pour la détermination de la validité scientifique de l'ajout de l'ail et (ou) de l'oignon à la liste des allergènes prioritaires au Canada.

Un grand nombre de publications repérées initialement dans la base de données ont été écartées de notre évaluation, car les études ne portaient que sur les expositions cutanées, respiratoires et (ou) professionnelles. Il a été considéré que ces données n'étaient pas pertinentes à l'égard de la question de l'allergénicité alimentaire. Toutefois, il convient de reconnaitre que ces renseignements sont importants pour les cliniciens lorsqu'il s'agit d'évaluer la possibilité de troubles de sources professionnelles ou environnementales, particulièrement là où l'ail et (ou) l'oignon sont transformés.

Les données pertinentes pour l'évaluation de l'allergénicité de l'ail ou de l'oignon étaient fréquemment présentées dans des publications dont le principal objectif d'étude ne comportait pas précisément l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon. Cette situation a rendu le repérage de l'information pertinente plus ardue et a pu entraîner l'exclusion de renseignements disponibles sur l'ail et (ou) l'oignon.

Aucune étude comportant des tests de provocation par voie orale en double aveugle comparatifs avec placebo ayant été conçue spécialement pour l'évaluation de l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon n'a été retrouvée dans la documentation. Les études disponibles n'ont pas été conçues pour évaluer l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon en particulier et par conséquent, les détails qualitatifs et quantitatifs au sujet des préparations d'ail ou d'oignon n'étaient pas présentés. Qui plus est, les plans d'étude évaluant plusieurs denrées alimentaires ne mentionnaient pas si on avait eu recours à des témoins appropriés afin de distinguer les réactions allergiques des effets irritants associés aux composés contenant du soufre issus de l'ail et de l'oignon.

Sur la base des limites déterminées de l'examen systématique de la documentation, la qualité des preuves ne s'est pas révélée suffisante pour satisfaire aux critères canadiens pour l'ajout d'un aliment à la liste des allergènes alimentaires prioritaires.

Le premier critère des recommandations du Comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires (JECFA) adoptées par le Canada stipule l'existence d'une relation de cause à effet crédible, établie sur la base de résultats positifs à des tests de provocation par voie orale en double aveugle comparatifs avec placebo ou de rapports faisant état, sans équivoque, de réactions dont les caractéristiques correspondent aux caractéristiques typiques des réactions allergiques ou d'intolérance. En l'absence d'essais de provocation orale en double insu comparatifs avec placebo, les études à l'appui ont été évaluées sur la base de la qualité des preuves fournies par le plan d'étude (ACAAI, 2006) (tableaux 1 à 3).

Les observations disponibles sont insuffisantes pour appuyer la détermination d'une relation de cause à effet crédible à l'égard de l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon. Il a été considéré que les résultats positifs obtenus au moyen des tests diagnostiques (tests par piqûre/IgE), lesquels ont été utilisés dans la majorité des études à l'appui, étaient insuffisants pour justifier une relation de cause à effet, car les observations issues de la base de données permettent de présumer que les tests diagnostiques par piqûre/IgE peuvent ne pas procurer le reflet exact du potentiel de réactions allergiques provoquées par la consommation d'ail et (ou) d'oignon.

Valdivieso et al. (1994) ont fait état d'une prévalence de 8 % d'allergies à l'oignon parmi 106 adultes sélectionnés au hasard au sein de la clientèle d'une clinique d'allergologie pour être soumis à un test par piqûre. Cependant, quatre de ces huit sujets ont éprouvé des symptômes cliniques associés à l'exposition à l'oignon et seuls trois de ces huit sujets ont obtenu des résultats positifs quant à la détection des IgE spécifiques de l'oignon. Qui plus est, une provocation orale avec de l'oignon a été réalisée chez deux de ces sujets et tous deux ont obtenu des résultats négatifs (Valdivieso et al., 1994). Les tests diagnostiques standard auxquels on a eu recours lors de cette étude (test par piqûre/IgE) n'ont pas fourni d'indications précises de réactions allergiques après la consommation d'oignon. L'étude réalisée par Broccafogli et al. (1994) a également fait état de résultats incohérents entre les résultats positifs des IgE et ceux de la provocation orale. Dans cette étude, 58 % (7/12 cas) et 33 % (3/9 cas) ont obtenu des résultats sériques positifs aux IgE spécifiques de l'ail et de l'oignon respectivement, mais un seul cas dans chaque groupe a subi une réaction allergique confirmée à la suite de la provocation orale. Asero et al. (2007) ont aussi affirmé que les résultats des tests par piqûre n'étaient pas fiables pour l'ail et l'oignon, car plusieurs des sujets qui ont obtenu des résultats positifs à ce test consommaient de l'ail et de l'oignon sans subir de symptômes. Qui plus est, les études qui n'ont fait état que de la prévalence des réactions positives à l'ail et (ou) à l'oignon à la suite des tests par piqûre n'ont pas tenu compte des propriétés irritantes des composés contenant du soufre issus de l'ail et de l'oignon. Sans une confirmation supplémentaire de l'allergie alimentaire, ces effets irritants ne peuvent pas être écartés lors de l'interprétation des résultats. Sans observations issues d'études comportant des tests de provocation orale en double aveugle comparatifs avec placebo, le petit nombre de tests provocations par voie orales positifs dont on a fait état dans les études et l'incertitude quant aux résultats (en raison des incohérences observées entre les résultats diagnostiques positifs et les quelques rapports de réactions allergiques ou d'intolérance à la suite des provocations orales), la qualité des preuves issues de la base de données actuelle est insuffisante pour établir une relation de cause à effet crédible quant à l'allergénicité orale de l'ail et (ou) de l'oignon.

Le second critère des recommandations du Comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires (JECFA) adoptées par le Canada requiert des rapports de réactions systémiques graves à la suite de l'exposition à la denrée alimentaire. Des réactions anaphylactiques associées à la consommation d'ail et (ou) d'oignon ont été signalées dans certains cas particuliers, mais la prévalence des réactions de type anaphylactique graves que l'on associe à l'ingestion d'ail et (ou) d'oignon s'est révélée faible. Une analyse rétrospective d'une durée de 9 ans (de 1984 à 1992), réalisée en France, a permis de faire rapport de l'incidence des 19 denrées alimentaires les plus susceptibles de provoquer des réactions anaphylactiques (André et al., 1994). Ni l'ail ni l'oignon ne comptaient au nombre de ces 19 aliments associés à l'anaphylaxie. Chez les personnes sensibles, l'incidence des aliments associés aux réactions anaphylactiques variait de 1 à 18 %. Dans les 12 rapports de cas spécifiques, il est fait état de 7 (3 à l'ail, 3 à l'oignon et une aux deux) personnes qui ont subi des réactions de type anaphylactique et de 4 (une à l'ail, 2 à l'oignon et une aux deux) qui ont eu besoin d'une intervention médicale d'urgence. Dans certains cas, les sujets ayant subi des réactions anaphylactiques à une forme particulière d'ail et (ou) d'oignon ont toléré l'ail et (ou) l'oignon sous une autre forme. Le cas pour lequel on a fait état d'une réaction anaphylactique à la suite de la consommation d'ail non mûr a aussi indiqué que le sujet tolérait la consommation de gousses d'ail et d'oignon (Perez-Pimiento et al., 1999). On a fait état de deux cas d'anaphylaxie provoquée par l'exercice après avoir consommé de l'oignon, mais on a aussi indiqué qu'aucune réaction allergique n'a été provoquée par la consommation d'oignon si on s'est abstenu de faire de l'exercice (Hicks et Tanner, 1998; Perez-Calderon et al., 2002) et dans l'autre cas, on n'a fait état que de réactions associées à la consommation d'oignon cru, mais d'une tolérance à l'oignon cuit (Arena et al., 2000). On a aussi observé des tolérances à l'ail et (ou) à l'oignon cuits dans plusieurs autres cas où des réactions de moindre gravité sont survenues après la consommation de préparations à base de ces légumes crus. On présume que la fragilité des antigènes de l'ail et de l'oignon à la chaleur et aux enzymes digestives constitue la raison pour laquelle de telles tolérances sont observées et qu'elle peut expliquer la faible prévalence mentionnée ci-dessus des réactions anaphylactiques associées à l'ingestion d'ail et (ou) d'oignon. Dans le cadre d'une étude ouverte portant sur la fréquence des symptômes provoqués par des aliments, parmi 169 sujets monosensibilisés au pollen de plante herbacée, la consommation d'ail ou d'oignon était principalement associée à des symptômes gastrointestinaux et cutanés tels que l'urticaire (Boccafogli et al., 1994). On a considéré que ces réactions étaient de légères à modérées (Brown, 2004).

Le troisième et dernier critère des recommandations du Comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires (JECFA) adoptées par le Canada requiert l'évaluation de toutes les données canadiennes disponibles sur la prévalence chez les enfants et les adultes issues d'études cliniques adéquates ou, autrement, des données disponibles provenant d'autres pays appuyées conformément à la première recommandation. Actuellement, des données sur la prévalence de ces allergies ne sont pas disponibles au Canada ni dans d'autres régions du monde.

Bien que des observations scientifiques indiquent que certaines personnes subissent des réactions graves à la suite de l'ingestion d'ail et (ou) d'oignon, la prévalence des allergies à l'ail et (ou) à l'oignon chez les enfants et chez les adultes demeure inconnue, et les données cliniques sont insuffisantes pour établir une relation de cause à effet crédible confirmant l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon. Par conséquent, la qualité globale des preuves pour satisfaire aux critères canadiens qui régissent l'ajout de nouveaux allergènes à la liste des allergènes prioritaires est actuellement inadéquate.

Malgré les limites de la base de données actuelle, conformément aux modifications proposées au Règlement sur les aliments et drogues(1220 - Étiquetage amélioré des sources d'allergènes alimentaires et de gluten et des sulfites ajoutés), cet examen a tenu compte de la probabilité que des réactions allergiques surviennent en raison de sources d'ail et (ou) d'oignon non déclarées sur les aliments préemballés. Sur la base des observations disponibles, on considère que le potentiel de réactions allergiques graves après la consommation de sources cachées d'ail et (ou) d'oignon dans les produits alimentaires préemballés est improbable. Sur la base des résultats d'une étude rétrospective d'une durée de neuf ans, on considère que la prévalence des réactions allergiques graves après l'ingestion d'ail et (ou) d'oignon est faible par rapport à celle des réactions allergiques graves causées par les autres allergènes alimentaires. Qui plus est, la majorité des réactions allergiques dont on a fait état sont survenues après la consommation d'ail et (ou) d'oignon crus. Bien que les protéines allergéniques contenues dans l'ail et l'oignon qui déclenchent des réactions allergiques systémiques demeurent à être entièrement identifiées et caractérisées, les rapports de tolérance à l'ail et (ou) à l'oignon cuits indiquent que les antigènes sont fragiles à la chaleur et (ou) au processus de digestion. Sur la base de cette observation, la probabilité de consommer de l'ail et (ou) de l'oignon crus présents dans les aliments préemballés est considérée comme étant minime, car on peut raisonnablement tenir pour acquis que la vaste majorité des aliments préemballés sont soumis à la chaleur, soit à l'étape de la fabrication, soit pendant la préparation de la denrée alimentaire pour sa consommation. Il convient aussi de noter qu'il n'a été fait état d'aucun cas d'exposition à l'ail et (ou) à l'oignon par des sources cachées ou par une contamination croisée entre des denrées alimentaires. En outre, dans la base de données, les renseignements permettant d'établir une dose-seuil pour l'ail et (ou) l'oignon sont insuffisants, car trois rapports de cas seulement ont pu fournir la quantité déclenchante d'ail et (ou) d'oignon ingérée avant que la réaction allergique survienne. Cependant, la dose déclenchante la plus faible qui a été signalée dans la base de données concernait un cas dans lequel le prurit laryngé, la rhinorrhée et la toux se sont manifestés après l'ingestion de 0,5 g d'ail (30 mg de protéines 1) (Moneret-Vautrin et al., 2002). Les données limitées actuelles indiquent que des quantités modérées 2 d'ail et (ou) d'oignon peuvent être requises pour déclencher des réactions allergiques chez des personnes sensibilisées. Par conséquent, le risque potentiel de réactions allergiques déclenchées après la consommation d'ail et (ou) d'oignon utilisés comme épice ou assaisonnement non déclarés est considéré comme étant minime.

Conclusions :

Une évaluation de la base de données actuellement disponible au sujet de l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon ne permet pas d'établir de preuves suffisantes pour satisfaire aux critères canadiens et de les ajouter à titre de nouveaux allergènes à la liste des allergènes alimentaires prioritaires. Bien que des observations scientifiques permettent de présumer que certaines personnes subissent des réactions graves à la suite de l'ingestion d'ail et (ou) d'oignon, la prévalence des allergies à l'ail et (ou) à l'oignon chez les enfants et chez les adultes demeure inconnue, et les données cliniques sont insuffisantes pour établir une relation de cause à effet crédible avec l'allergénicité de l'ail et (ou) de l'oignon. Qui plus est, selon l'information disponible dans la base de données actuelle, la possibilité qu'une personne subisse des réactions allergiques graves provoquées par des sources cachées d'ail et (ou) d'oignon dans les aliments préemballés est considérée comme minime.

En conclusion, on considère actuellement que la qualité globale des preuves est insuffisante pour appuyer la déclaration de l'ail et (ou) de l'oignon comme allergènes alimentaires prioritaires et par conséquent, le Règlement sur les aliments et drogues(1220 - Étiquetage amélioré des sources d'allergènes alimentaires et de gluten et des sulfites ajoutés) n'est pas applicable à l'utilisation de l'ail et (ou) de l'oignon dans les denrées alimentaires.

Recommandations :

Sur la base des conclusions de ce rapport, il est recommandé actuellement que l'ail et (ou) l'oignon ne soient pas ajoutés à la liste canadienne des allergènes alimentaires prioritaires.

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1 En tenant pour acquis que l'on a consommé de l'ail cru, les données indiquent que 136 g d'ail cru contiennent 9 g de protéines ( Nutrition Data http://www.nutritiondata.com).

2 Les concentrations minimales avec effet nocif observé publiées pour les allergènes alimentaires : œuf (de 0,13 à 1,0 mg de protéines [P]), arachide (de 0,25 à 10 mg P), lait (de 0,36 à 3,6 mg P), fruits à coque (de 0,02 à 7,5 mg P), soya (de 88 à 522 mg P) et poisson (de 1 à 100 mg P).

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